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JFR 2024 – Les spondyloarthrites axiales à CRP normale – Pourquoi s’y intéresser ?

Une fréquence élevée

Les spondyloarthrites axiales à CRP normale sont extrêmement fréquentes. Dans les grandes séries et cohortes, on retrouve une CRP normale dans environ 50 % des cas de spondyloarthrite axiale radiographique (notre ancienne spondylarthrite ankylosante) et dans environ 70 % des cas de spondyloarthrite non radiographique (qui est majoritaire). Cette CRP initiale normale ne nous permet pas de suivre l’activité de la maladie ou encore la réponse au traitement. 

 

Un élément déterminant pour le traitement ?

Dans les spondyloarthrites axiales, aujourd’hui, nous n’avons pas d’études face-face entre les différentes classes thérapeutiques. Dans les recommandations, en termes d’options thérapeutiques, il est indiqué anti-TNF, anti-IL-17 et JAK inhibiteurs, avec un choix premier souvent en faveur des anti-TNF, parce que ce sont les plus anciens. Nous avons besoin d’éléments discriminants qui nous permettraient d’opter pour telle ou telle classe thérapeutique en fonction du phénotype du patient. Pour cela, aujourd’hui, nous n’avons pratiquement que les manifestations extra-articulaires (une maladie de Crohn associée, des uvéites à répétition…). Et nous savons que les MICI ne répondent pas aux anti-IL-17.

Une CRP initiale normale pourrait-elle nous aider : les différentes classes thérapeutiques y répondent-elles de la même façon ?

Les anti-TNF 

Nous savons que, parmi d’autres éléments comme l’âge jeune, l’évolution relativement récente de la spondyloarthrite, le HLA B27 et, pour les non radiographiques, la sacro-iliite en IRM, une CRP élevée est un facteur prédictif de bonne réponse aux anti-TNF.

Les anti-IL-17

Nous n’avons que très peu de données, et il ne s’agit que d’études post-hoc. 

Avec le sécukinumab, dans la spondyloarthrite axiale radiographique, deux études de phase III ont été poolées. Les résultats montrent que, pour pratiquement tous les scores de réponse (ASDAS, BASDAI, ASAS40, etc.), il y a une réponse très correcte, de l’ordre de 30 % de répondeurs quand la CRP est normale, et de 45-50 % quand elle est élevée (Fig. 1) (1). 

Figure 1 – Réponses ASAS20 et ASAS40 au sécukinumab chez des patients avec CRP initiale normale ou élevée dans la spondyloarthrite axiale radiographique (1). 

Avec l’ixékizumab, dans la spondyloarthrite axiale radiographique en échec aux AINS, l’étude post-hoc de COAST-V, avec un bras de référence adalimumab, montre que, quand la CRP est normale, la réponse à l’adalimumab en ASAS40 est à peine supérieure au placebo, alors que l’ixékizumab montre déjà un bon taux de réponse. Avec une CRP élevée, le taux de répondeurs pour l’adalimumab monte en flèche à 40-50 %, alors que celui pour l’ixékizumab est à peine plus élevé que pour une CRP normale (Fig. 2). 

Figure 2 – Réponses ASAS40 à l’ixékizumab chez des patients avec CRP initiale normale ou élevée dans la spondyloarthrite axiale radiographique (2). 

L’idée est donc que l’existence d’une CRP normale pourrait peut-être être un élément discriminant pour le choix d’un anti-IL-17 par rapport à un anti-TNF. Attention cependant, il ne s’agit que d’études post-hoc, sur de petits effectifs. Nous n’en sommes pas encore là, mais c’est une piste de réflexion intéressante dans notre recherche pour trouver des éléments nous guidant dans le choix des thérapeutiques. 

 

À suivre ?

Dans le groupe national de travail sur les données qui nous manquent dans la spondyloarthrite axiale, nous avons pensé à monter un grand essai thérapeutique sur la spondyloarthrite axiale non radiographique à CRP normale afin de comparer anti-TNF et anti-IL-17. Mais c’est très compliqué à mettre en place notamment en termes de nombre suffisant de patients. Je ne suis donc pas sûr que nous arrivions à démontrer le potentiel avantage des anti-IL-17 en cas de CRP normale.

L’auteur déclare avoir des liens d’intérêt avec Abbvie, Amgen, BMS, Celltrion, Chugai, Janssen-Cilag, Lilly, MSD, Novartis, Pfizer, Sanofi, UCB.

Bibliographie

1. Braun J, Deodhar A, Landewé R et al. Impact of baseline C-reactive protein levels on the response to secukinumab in ankylosing spondylitis: 3-year pooled data from two phase III studies. RMD Open 2018 ; 4 : e000749. 

2. Maksymowych WP, Bolce R, Gallo G et al. Ixekizumab in radiographic axial spondyloarthritis with and without elevated C-reactive protein or positive magnetic resonance imaging. Rheumatology 2022 ; 61 : 4324-34.