Site professionnel spécialisé en Rhumatologie

Arthrose : 20 ans d’avancées considérables

Les progrès dans le domaine de l’arthrose sur ces 20 dernières années ont été absolument considérables, notamment en termes de recherche fondamentale, mais aussi, et de fait, en termes de recherche de nouveaux traitements, souvent validés chez l’animal, mais malheureusement plus rarement chez l’homme. De sorte que persiste l’idée qu’il n’y a pas eu de grandes avancées dans l’arthrose. Ceci est dû à l’absence d’un traitement “révolutionnaire” qui aurait marqué la communauté scientifique et le grand public. Mais nous allons revoir, qu’en réalité, les progrès ont été tout à fait conséquents et qu’ils sont émergents, avec beaucoup d’espoir pour l’avenir.

Quelle était la situation de la prise en charge de l’arthrose il y a 20 ans ? 

Il s’agissait d’une prise en charge très classique et très limitée : des traitements non pharmacologiques, c’est-à-dire de la kinésithérapie, et un arsenal faible qui allait des antalgiques aux anti-inflammatoires, en passant par quelques injections, notamment de corticoïdes. Les injections d’acide hyaluronique ont été une avancée dans ce domaine, et elles sont encore très pratiquées, même si elles font toujours l’objet d’une controverse. 

Le vrai coup de tonnerre dans le domaine de l’arthrose a été, en 1994, la publication des premières greffes de chondrocytes par l’équipe suédoise de Mats Brittberg dans la prestigieuse revue du New England Journal of Medicine. Cela a suscité beaucoup d’espoirs, mais on s’est assez rapidement aperçu que cette possibilité thérapeutique était limitée aux lésions focales du cartilage dans un environnement de cartilage sain, ce qui est évidemment éloigné de la maladie arthrosique. 

 

Comment résumeriez-vous les évolutions dans le domaine de l’arthrose durant ces 20 dernières années, en termes de nouveautés thérapeutiques et d’évolution des stratégies ? 

L’évolution des stratégies

Très clairement, il y a eu une évolution des concepts : la maladie n’est finalement pas simplement une usure du cartilage, mais une maladie pluritissulaire et une maladie extrêmement complexe. En effet, les différents tissus de l’articulation, qu’ils s’agissent de la membrane synoviale, de l’os sous-chondral, du cartilage lui-même, mais aussi des tissus environnants, agissent de façon très complexe en communiquant les uns avec les autres à des degrés divers et variables au gré de l’évolution de la maladie. Ceci pourrait rendre compte des variabilités des présentations cliniques.

Les nouveautés thérapeutiques

Les advanced therapy medicinal products (ATMP)

Le premier domaine concerne tout ce que l’on appelle les advanced therapy medicinal products, comprenant trois spécialités. 

La bio-ingénierie tissulaire, c’est-à-dire toutes les greffes cellulaires qu’on peut appliquer par transplantation dans le cartilage lui-même. Cette bio-ingénierie tissulaire est directement la résultante des premières greffes de chondrocytes. Nous sommes passés des simples greffes de chondrocytes à des greffes de biomatériaux dits de deuxième, puis maintenant, de troisième générations. Pour faire simple, il s’agit de greffer un biomatériel intelligent qui contient des cellules, soit des chondrocytes, soit des cellules souches et des facteurs de croissance pro-anaboliques. L’objectif est en réalité de réparer un tissu défaillant en important tous les composés qui vont permettre de réparer et de refaire du cartilage. 

Ceci permet d’obtenir des résultats très importants, notamment dans les chondropathies focales du cartilage avec la réparation d’un cartilage qui n’est pas stricto sensu celui originel. Ces matériaux sont sophistiqués et peuvent aujourd’hui réparer non seulement le cartilage, mais également le soubassement, c’est-à-dire l’os sous-chondral. Mais cela s’adresse toujours à des maladies focales du cartilage et pas encore vraiment à l’arthrose avancée. L’avenir dans ce domaine appartient à la régénération in situ du cartilage en stimulant les cellules souches résidentes.

Les thérapies cellulaires consistent à injecter des cellules souches dans l’articulation. Ces thérapies ont suscité beaucoup d’espoir, et donc beaucoup d’essais en cours. Cependant, pour l’instant, l’effet antalgique semble mineur et il n’a pas été encore démontré un effet chondroprotecteur. Nous avons appris, grâce à ces injections, qu’en réalité, leurs effets n’étaient pas dus à la transformation de ces cellules souches vers un autre type de cellules, notamment vers les chondrocytes, mais plutôt à la libération de facteurs contra-cataboliques. Dans le même ordre d’idée, l’injection intra-articulaire de concentrés plaquettaires correspond à une forme de bolus de facteurs contra-inflammatoires et de nombreux essais sont en cours pour valider leurs indications. 

La thérapie génique, par vecteurs viraux ou non viraux, a suscité aussi beaucoup d’espoirs, mais également beaucoup de déceptions. En effet, les premiers essais étaient non convaincants. Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas de développement en cours (avec les gènes de l’IL-1RA, de l’IL-10). Je pense notamment au développement de thérapie génique à base d’adénovirus dits helper dépendants avec une transfection du gène IL-1RA, qui permet d’augmenter la durée de l’effet.

La douleur

Indubitablement, dans le domaine de la douleur, l’essai le plus fracassant a été la publication par Nancy Lane dans le New England Journal of Medicine relative aux anti-NGF. Il faut bien se souvenir que ces anti-NGF ont montré un effet antalgique inédit dans l’arthrose. Il s’agissait d’un espoir absolument retentissant avec le passage d’une voie intraveineuse à une voie sous-cutanée. Malheureusement, l’observation d’arthropathies destructrices a d’abord interrogé, puis a conduit à l’arrêt de leur développement, notamment du tanézumab. Ceci nous a permis d’observer qu’un effet antalgique trop important dans l’arthrose pouvait s’accompagner d’arthropathies rapidement destructrices. 

Néanmoins, il y a un champ ouvert dans le traitement de la douleur de l’arthrose qui vise principalement à moduler les récepteurs cellulaires polymodaux présents sur les terminaisons des neurones. Je voudrais citer :

l’inhibition des canaux ioniques, qui permet de diminuer les phénomènes de transmission douloureuse. C’est certainement un domaine d’avenir, qui n’en est qu’à ses balbutiements comme le montre très récemment l’inhibition du canal Nav1.7 qui a fait l’objet d’une publication dans Nature ;

l’utilisation de capsaïcine intra-articulaire, avec, là encore, un effet très probant dans le domaine antalgique et un effet rémanent très intéressant ;

l’utilisation des agonistes des récepteurs cannabinoïdes.

Enfin, les chimiokines constituent une autre cible thérapeutique puisque notamment la chimiokine CCL-2 intervient non seulement dans l’inflammation, mais aussi dans la transmission de la douleur par le biais de recrutement de macrophages dans le ganglion dorsal qui, in situ, favorisent l’excitabilité neuronale.  

Il y a donc beaucoup de progrès à venir concernant les effets purement antalgiques dans l’arthrose. Et, il faut se souvenir que, très souvent, dans l’arthrose, l’effet analgésique n’est pas corrélé à l’effet chondroprotecteur.

La chondroprotection

Le domaine dans lequel nous attendions les avancées thérapeutiques les plus importantes était celui de la chondroprotection. Et, dans ce domaine, l’essai le plus marquant a été l’utilisation du FGF18 en injection intra-articulaire. Cela a été une petite “révolution” qui date d’il y a 4 ans, avec, pour la première fois, un essai randomisé contre placebo montrant qu’une injection répétée d’un facteur de croissance pouvait ralentir la perte du cartilage, mesurée sur des IRM avec un recul à 2 ans, puis une phase ouverte sur 3 ans. Malgré cela, l’essai a malheureusement été largement contraint par l’absence d’effet antalgique concomitant sur l’ensemble de la population étudiée, entraînant, de fait, un arrêt du développement du FGF18, les agences exigeant d’un médicament chondromodulateur qu’il démontre aussi un effet symptomatique. 

Ceci ne veut pas dire qu’à l’avenir il n’y aura pas d’autres produits qui pourront être développés. Je voudrais d’ailleurs dire un mot sur les anti-IL-1. L’utilisation des anti-
cytokines a été extrêmement décevante qu’il s’agisse des anti IL-1 dans la gonarthrose ou des anti-TNF ou des anti IL-6 dans les arthroses digitales. Pour autant, dans un sous-groupe de patients souffrant de coronaropathies et qui étaient “inflammatoires”, l’utilisation au long cours du canakinumab a montré qu’il pouvait diminuer le pourcentage de recours aux prothèses du genou et/ou de la hanche. 

Le développement autour des anti-cytokines n’est donc probablement pas totalement terminé et il existe par ailleurs un certain nombre d’inhibiteurs de plusieurs enzymes, notamment les métalloprotéases et les agréganases, dont il faudra suivre l’évolution et le développement futur chez l’homme. 

En termes de chondroprotection, un certain nombre d’essais se sont intéressés au remodelage de l’os sous-chondral visant à diminuer l’activité ostéolytique, avec, in fine, des résultats mitigés, puis négatifs avec le zolédronate dans la gonarthrose et, à confirmer, avec le dénosumab dans l’arthrose digitale. 

L’imagerie

Nous ne pouvons pas parler de nouveautés thérapeutiques sans aborder les avancées dans le domaine de l’imagerie et notamment l’important développement en IRM. Nous avons pu mieux définir, par différents systèmes de classification, les lésions non seulement du cartilage, mais également les lésions de l’os chondral (bone marrow lesions, BML). Tout cela a permis de montrer qu’il y avait des corrélations importantes entre la découverte de ces lésions et les phénomènes douloureux et la progression de la maladie. 

L’IRM sera demain fonctionnelle et permettra de quantifier de façon quasiment biochimique l’évolution des lésions cartilagineuses. 

Les biomarqueurs

Énormément de travaux ont essayé de définir “le marqueur” de l’évolutivité de la maladie, mais aucun n’a pu franchir le seuil de la pertinence clinique dans la routine. Nous nous orientons plus vers un panel de biomarqueurs qui inclut des marqueurs du turn over de la matrice, notamment du collagène de type 2, de l’inflammation, de la réparation tissulaire, de l’activité de l’os sous-chondral et dont la combinaison pourrait aider à mieux identifier les profils à risque. 

Beaucoup d’appelés, peu d’élus… 

La chirurgie

Enfin, je crois qu’on ne peut pas oublier les progrès dans le domaine de la chirurgie prothétique, et singulièrement dans la chirurgie de la prothèse de hanche, avec la chirurgie mini-invasive, la double chambre pour les prothèses, limitant les problèmes de luxation et, bien entendu, les très grands progrès qui ont été faits sur la durée de vie de ces prothèses, notamment avec l’utilisation des composés en céramique. 

Il y a donc eu d’énormes progrès en termes thérapeutiques, qui nous ont parallèlement permis d’améliorer notre compréhension de la physiopathologie de la maladie.

 

Quels progrès ont été réalisés en ce qui concerne la compréhension de la physiopathologie de l’arthrose ?

Différents phénotypes de la maladie

La première chose a été de bien insister sur le fait qu’il y avait plusieurs phénotypes pour comprendre la maladie. Nous différencions :

• la maladie liée à l’âge ;

• la maladie plutôt associée aux femmes âgées d’une soixantaine d’années, l’arthrose dite métabolique ;

l’arthrose génotypique, où, là encore, de grands progrès ont été réalisés, avec la découverte de différents gènes impliqués ;

• la maladie liée à un traumatisme articulaire et aux activités sportives intenses et qui est en augmentation exponentielle en raison des modes de vie.

Une maladie pluritissulaire

Dans la compréhension stricte de la physiopathogénie, les progrès ont été absolument considérables. Le premier élément à garder en mémoire est que nous sommes passés du concept d’une maladie d’usure du cartilage à celui d’une maladie pluritissulaire, qui fait intervenir non seulement une maladie de la membrane synoviale, mais également une maladie de l’os sous-chondral, une maladie des tissus péri-articulaires et, bien évidemment, une maladie du cartilage. Avec cette idée qu’il y avait une interférence très importante entre les atteintes de la membrane synoviale, de l’os sous-chondral et du cartilage et qu’il pouvait y avoir des atteintes pluritissulaires pouvant varier dans le temps. Autrement dit, nous avons compris que la maladie pouvait avoir des composantes par exemple de poussées synoviales, mais également des composantes de poussées de la maladie de l’os sous-chondral.

Ce sont véritablement de très importants progrès dans la compréhension de la maladie, en termes de genèse, qui peut être à la fois sous-chondrale mais également synoviale. 

L’inflammation

La progression de la compréhension de l’arthrose la plus importante a été dans le domaine de l’inflammation.

L’inflammation systémique

L’une des avancées concerne le concept d’une inflammation systémique, que l’on appelle l’inflammaging, qui est liée non seulement à l’âge, mais aussi à l’obésité (par le biais de la sécrétion de cytokines et la découverte récente des adipokines), à la déprivation en hormones sexuelles et qui va contribuer à l’évolution locale de la maladie. Avec, dans ce concept d’inflammation systémique, l’émergence de maladies liées à l’âge non seulement comme l’arthrose, mais également les maladies dégénératives, notamment neurologiques. 

L’inflammation locale

Par ailleurs, nous avons bien mieux compris l’inflammation locale, par la découverte de multiples cytokines, de multiples médiateurs de l’inflammation, par la meilleure compréhension de l’ensemble des enzymes impliquées, et notamment, il y a une dizaine d’années, les agrécanases qui sont le lien entre l’IL-1 et la dégradation du cartilage. Nous connaissons maintenant un très grand nombre de médiateurs que nous pouvons bloquer, avec une émergence d’anti-cytokines et de bloqueurs des activités enzymatiques. 

Parmi ces médiateurs, il faut également souligner l’intervention de facteurs très importants comme l’HIF-1, qui est lié à la tension en oxygène, qui peut avoir un effet protecteur, mais aussi un effet délétère via HIF2 en fonction de l’évolution de la maladie.

L’immunité innée

Toujours dans ce profil d’inflammation, l’une des nouveautés importantes a été la découverte, notamment dans les arthroses émergentes, dans les stades les plus précoces, du rôle de l’immunité innée. Ces dernières années, nous avons par exemple découvert que, dans un traumatisme débutant du cartilage, il y a intervention des acteurs clés de l’immunité innée, notamment des macrophages qui se polarisent en phénotype M1 pro-inflammatoire, qui vont réagir aux débris moléculaires de cartilage (DAPMS) et provoquer une réaction inflammatoire qui pourrait, à terme, faire le lit de la maladie arthrosique. Là encore, nous pouvons agir de façon très précoce avec une intervention directe sur les macrophages en favorisant leur polarisation en M2 contra-inflammatoire.

L’inflammation de l’os sous-chondral

Nous avons beaucoup appris sur les remaniements de l’os sous-chondral avec une phase précoce ostéolytique précédant une phase tardive de condensation. Mais, les progrès majeurs sont issus de l’interconnexion entre le cartilage des couches profondes et l’os sous-chondral, résultante de la rupture de la zone étanche dite de la tidemark. Cette rupture met en contact les deux tissus et entraîne une invasion vasculaire du cartilage, fruit de facteurs angiogéniques libérés  in situ. Le TGF bêta semble jouer un rôle clé dans la différenciation des stem cells de l’os sous-chondral en îlots de cellules ostéoïdes et s’accompagne d’une libération très importante de facteurs angiogéniques. En conséquence, dans les couches profondes du cartilage, les chondrocytes stimulés par ces facteurs de croissance vont s’orienter vers un phénotype hypertrophique et inflammatoire, ce qui fait le lit de la chondrolyse focale. Il s’agit d’un phénomène  qui constitue une nouvelle cible thérapeutique potentielle : utilisation des anti-angiogéniques (anti-VEGF), utilisation d’agents bloquant le TGF, utilisation d’anti-résorbeurs.

L’activation du complément

Dans le même ordre d’idée, on a découvert, il y a quelques années, le rôle du complément et de son activation dans ces phénomènes d’inflammation précoce au cours de l’arthrose.

Le chondrocyte

Le chondrocyte n’est plus seul et n’est pas totalement isolé dans sa matrice. Les travaux récents ont pu montrer qu’il existait plusieurs sous-types de chondrocytes (plus de 50 phénotypes) exprimant des récepteurs soit pro, soit contra-inflammatoires et des cellules souches dans les zones superficielles du cartilage. Les chondrocytes peuvent communiquer entre eux par de longs organelles ciliés, sensibles au stress mécanique. 

Lors du processus arthrosique, le chondrocyte va subir une senescence (arrêt de la prolifération et libération de facteurs pro-inflammatoires) puis, à terme, sous l’effet du stress oxydatif, des phénomènes inflammatoires, une mort cellulaire par apoptose et/ou par nécrose.

La dysbiose intestinale

Enfin, je voudrais aborder le rôle de la dysbiose intestinale, qui n’est pas spécifique de l’arthrose, mais qui a été identifiée également comme étant l’un des facteurs qui pouvaient contribuer à l’émergence de la maladie et à sa perpétuation. Des modèles de greffes et de transplantations fécales ont démontré des effets très intéressants dans l’arthrose chez l’animal. 

Je voudrais vraiment insister sur le fait qu’il y a eu, dans le domaine de l’arthrose, des progrès absolument énormes et qui ont permis de déboucher, et qui vont encore déboucher, sur des nouveautés thérapeutiques.

 

Comment imaginez-vous l’avenir de la prise en charge de l’arthrose ?

Des traitements séquentiels

Le premier point très important est qu’il est absolument illusoire de vouloir trouver un traitement qui va régler l’ensemble de la progression de la maladie. En effet, nous sommes dans un domaine très différent de celui du rhumatisme inflammatoire dans lequel le fait de combattre la synovite, d’éteindre la synovite ou l’enthésite s’accompagne d’une rémission à la fois clinique et dans la progression de la maladie. Dans l’arthrose, les choses sont beaucoup plus compliquées parce que plusieurs tissus interviennent, à des degrés différents, et à des temps différents dans l’évolution de la maladie. Donc, un seul traitement “miracle” est illusoire. En revanche, et très certainement à l’avenir, il faudra songer à des traitements séquentiels en fonction de l’évolution de la maladie. Pas de façon continue, mais, par exemple, en alternant des traitements plus anti-inflammatoires dirigés contre la synovite, avec des traitements plus pro-anaboliques dans les phases les plus calmes de la maladie, qui viseront à essayer de stimuler la réparation du cartilage, voire des traitements qui vont essayer de moduler le métabolisme de l’os sous-chondral. L’utilisation d’outils de détection de l’évolutivité anatomique grâce aux biomarqueurs, mais surtout grâce à l’IRM et à une analyse d’images (par l’intelligence artificielle) contribuant à la détection des lésions de plus en plus petites permettra au mieux d’en évaluer leur efficacité.

En résumé, plutôt des traitements séquentiels et plutôt des traitements adaptés à un temps t au profil clinique de la maladie.

Des traitements adaptés 

Le deuxième élément très important à l’avenir sera une adaptabilité des traitements, non seulement en fonction des phénotypes cliniques, mais, ce qui est plus original, aussi en fonction des endotypes. En effet, ce qui émerge actuellement, et qui prendra une place sans doute très importante, c’est de définir chez chaque individu un endotype particulier. Comment ? Par l’utilisation d’un certain nombre de biomarqueurs qui vont permettre de classer les malades dans différentes catégories :

• des malades avec un potentiel de régénération faible, 

• des malades avec un potentiel d’inflammation, notamment systémique, élevé, 

• des malades avec un potentiel d’atteinte structurale plus important.

Définir l’endotype, plus que le phénotype clinique, va permettre de mieux orienter à l’échelon individuel les traitements du futur. 

Des traitements plus précoces

Le troisième grand point, pour moi, sera de traiter de façon plus précoce l’arthrose. Nous avons un paradoxe dans cette maladie : elle évolue à bas bruit pendant très longtemps, avant de devenir symptomatique. Il faudra sans doute songer, dans l’arthrose précoce, à trouver des traitements qui interviendront de façon précoce, à une phase pré-symptomatique pour essayer de ralentir le génie évolutif de cette maladie. L’imagerie permettant une détection ultra-
précoce des premières lésions, notamment dans des populations définies à risque soit génétique, soit environnemental.

Si nous regardons de façon ultra-précoce, nous retombons sur la bio-ingénierie tissulaire. En effet, si nous arrivons à réparer à un stade ultra-précoce des lésions du cartilage, peut-être pourrons-nous diminuer l’évolution de la maladie. 

Des traitements antalgiques et chondroprotecteurs dissociés

Il faudra songer à bien dissocier, dans cette maladie, les traitements antalgiques des traitements chondroprotecteurs. Jusque-là, toutes les agences internationales demandent à ce qu’un traitement chondroprotecteur démontre un effet antalgique. Et cela paraît assez logique parce qu’il est difficile d’envisager un traitement qui n’ait pas un effet sur le malade lui-même. 

Mais, peut-être, faudra-t-il songer à revoir ce paradigme et évoluer vers deux traitements en parallèle, un qui vise la douleur et un autre qui vise à la chondroprotection. Sachant que la douleur est à visages multiples dans l’arthrose et non pas monomorphe. 

Imagerie et traitements locaux

Enfin, pour l’avenir, je suis très confiant concernant l’imagerie, notamment par IRM, qui sera certainement l’un des domaines les plus révolutionnaires de demain et qui servira d’outil pour guider et évaluer les réponses aux nouveaux traitements. La maladie arthrosique des membres inférieurs reste à mon sens d’abord une maladie résultant d’un déséquilibre local, notamment biomécanique. Il faut donc continuer à privilégier des traitements administrés localement et tester de nouvelles pistes antalgiques comme les radiofréquences ou les embolisations locales. 

Pour conclure, je crois que s’il y a une maladie qui va connaître des progrès considérables, c’est bien la maladie arthrosique.

Xavier Chevalier déclare avoir des liens d’intérêt avec Ibsa, Labpharma, Sanofi.