Lady Butler – Les vestiges d’une armée (1879)

À moins qu’il ne s’agisse d’un portrait, les médecins sont toujours peints avec des patients. Un médecin seul, sans patient, est pour le moins rare. Lady Butler a néanmoins représenté le
Dr William Brydon arrivant seul à Jalalabad en janvier 1842, unique survivant d’une armée de 16 500 personnes, apportant la nouvelle de la désastreuse retraite de Kaboul lors de la première guerre anglo-afghane.

Le peintre

Une femme peintre militaire, de surcroît jeune et jolie, voici de quoi étonner ses contemporains. Elizabeth Thompson (1846-1933), devenue Lady Butler par son mariage avec un général en 1877, abandonna les sujets religieux pour les thèmes militaires après avoir découvert Ernest Meissonier et Édouard Detaille à Paris. Elle acquit une brillante réputation outre-Manche grâce à ses peintures qui illustrèrent la bataille de Waterloo (Scotland Forever !), la guerre de Crimée (The Roll Call, Balaclava, The Return from Inkerman), ainsi que les guerres coloniales de l’époque victorienne (The Defence of Rorke’s Drift, Tel-el-Kebir) et même la Première Guerre mondiale (In Retreat from Mons: The Royal Horse Guards). Loin de glorifier la guerre comme ses prédécesseurs masculins, Lady Butler prenait soin de montrer l’épuisement des combattants et de révéler combien, en définitive, l’héroïsme s’accompagnait de douloureuses conséquences morales et physiques. Lady Butler représente rarement un corps à corps, mais plutôt les lignes britanniques telles que les virent leurs adversaires lors de l’action, ou bien la fin des combats, alors que les troupes victorieuses étaient épuisées. Certaines toiles acquirent une valeur iconique dans l’imaginaire collectif britannique, à une époque où le romantisme victorien était à son apogée. La notoriété de Lady Butler déclina toutefois, car son discours anti-impérialiste cadrait de moins en moins avec les sentiments exaltés du public britannique.